Antiphonaire monastique,
mutilé de quelques folios et de toute la fin. Temporal et sanctoral
nettement séparés, même au temps de Noël. Addition
d’un cahier (voire deux) à la jointure entre temporal et
sanctoral.
316 folios numérotés
de 1 à 330, avec quelques erreurs.
Format et justification non disponibles[1].
xive siècle.
Temporal et sanctoral sont
séparés, même pour les fêtes de saint Etienne, saint
Jean et saints Innocents, qui suivent Noël dans le plus grand nombre des
manuscrits.
1r-137v |
temporal, du 1er
dimanche de l’Avent à l’octave de la Pentecôte,
suivie de l’office de la Trinité. |
138r-149v |
addition d’un
office propre De Corpore Christi
suivi de l’office de sainte Scholastique. |
150r-318v |
propre des saints,
d’André (30 nov) à Catherine (25 nov),
complété par l’office de Marguerite, martyre. |
318v-330v |
communs des
apôtres et des martyrs. |
Les derniers folios (plusieurs
cahiers) ont été coupés. Après la suite des
communs, ils contenaient probablement la fin du temporal (historiæ
bibliques et dimanches après la Pentecôte). Cette hypothèse
est confirmée par les notes tardives copiées dans les deux
premières colonnes de la page de garde : ce sont des rubriques,
dont certaines renvoient aux historiæ (Sagesse, Tobie,
Macchabées…), avec une foliotation qui correspond à la
lacune (350-390 environ).
Dans le cours du manuscrit, 6
autres folios ont été coupés[2]. Postérieures à la foliotation, ces
mutilations demeurent inexpliquées : elles ne correspondent pas
à des lettres ornées, qui ont été laissées
intactes au voisinage.
La foliotation, en chiffres
arabes, coin supérieur droit, paraît assez récente. Elle
comporte plusieurs sauts, dont certains correspondent aux lacunes d’un
seul folio, d’autres sont de simples erreurs[3].
L’écriture du texte
est une belle gothique caractéristique de la seconde moitié du xive siècle dans
l’est de la France ou l’ouest de l’Allemagne.
La notation carrée de style
français, sur portées de 4 lignes (couleur ?), avec
bémol de première main et barres rythmiques est soignée et
homogène. Le bécarre est de 2e main, comme un certain
nombre de clés ajoutées pour faciliter la lecture. Ici, ou
là, quelques bémols ont été ajoutés par une
seconde main[4]. Il y a
aussi des grattages assez fréquents, que nous interpréterons
comme des hésitations du notateur.
Le manuscrit provient du fonds de
Saint-Georges de Villingen, abbaye transférée de Sankt Georgen im
Schwarzwald sous la pression de la Réforme en 1536, soumise à de
nombreuses vicissitudes liées à la conjoncture politique du
Bade-Württemberg, et supprimée en 1806.
Le manuscrit pourrait donc
être lié à Saint-Georges de la Forêt-Noire, petite
abbaye bénédictine dont la fondation par la congrégation
d’Hirsau remonte au 4 janvier 1083[5]. Le troisième de ses abbés, Theoger, de la
famille des comtes Folmar, qui mourut évêque de Metz (29 avril
1120), est connu pour son traité Musica Theogeri[6] qui prolonge l’enseignement de son maître
Guillaume d’Hirsau et s’appuie sur de nombreux exemples
d’antiennes. L’abbaye a connu au xiie
siècle une remarquable époque d’ouverture, notamment
à l’égard de Cluny, Saint-Blaise et Marbach.
L’étude de
l’histoire du fond « Sankt Georgen » de la Badische
Landesbibliothek[7] ne fournit aucun élément positif permettant
de relier le manuscrit à la première abbaye. C’est surtout
à partir de son transfert à Villingen que la bibliothèque
à cru de façon notable, au point d’attirer
l’intérêt des érudits de la cour de Suède. De
nombreux achats ont été effectués au cours du xviie siècle. Notre
manuscrit aurait donc pu être acquis à cette époque.
Les caractéristiques
musicales du manuscrit – qui font tout son intérêt pour
notre étude –
contribuent à lever cette indétermination.
Parmi les manuscrits germaniques,
les tableaux comparatifs révèlent ce manuscrit comme l’un
des plus proches témoins diastématiques de la tradition
neumatique de Hartker, malgré une longue distance dans le temps. On ne
peut ignorer la proximité du Bade-Wurttemberg et le diocèse de
Constance, proche de Saint-Gall[8].
En outre, ce manuscrit, qui fait
volontiers appel au si bémol de première main, introduisit plus
tard le bécarre. D’assez nombreux grattages et
ré-écritures témoignent de la perplexité du
copiste/chantre/théoricien face à des contextes mélodiques
difficiles à noter sur la portée de 4 lignes.
KARLSRUHE, Badische Landesbibl. S. Georges VI, f°
106v :
grattages caractéristiques sur Domino.
Aucune monographie n’a été publiée sur ce manuscrit qui est, jusqu’ici, passé inaperçu, en dehors d’une notice laconique dans le catalogue de la Bibliothèque :
E. Ettlinger. Die ursprüngliche Herkunft der Handschiften die aus Kloster-, Bischöflichen und Ritterschaftsbibliotheken nach Karlsruhe gelangt sind. Neudrück mit bibliographischen Nachträgen, Wiesbaden, 1974, 43-50.
Manuscrit KARLSRUHE, Badische Landesbibl. S. Georges VI
(f° 31v, répons de l’Epiphanie)
[1] Nous n’avons eu accès au manuscrit que par l’intermédiaire de photographies noir et blanc ; et ces renseignements ne se trouvent pas dans le catalogue de la bibliothèque.
[2] F° 6, 23, 121, 246, 309, 328.
[3] F° 155-158, 173-178, 183-186.
[4] Ainsi, sur la dernière page du mansucrit (f° 331), lignes 6 et 11.
[5] On ne peut ici suivre Cottineau, qui fait remonter l’abbaye au ixe siècle (L. H. Cottineau, Répertoire topo-bibliographique des abbayes et prieurés, 2, Mâcon, 1937, 2699 et 3402).
[6] M. Gerbert, Scriptores 2, 182-196. Cf. M. Huglo, Les tonaires, 282-283. La thèse de Fabian Lochner, sur Theoger (Ph. D. Notre Dame, Indiana), n’est pas microfilmée.
[7] E. Ettlinger. Die ursprüngliche Herkunft der Handschiften die aus Kloster-, Bischöflichen und Ritterschaftsbibliotheken nach Karlsruhe gelangt sind. Neudrück mit bibliographischen Nachträgen, Wiesbaden, 1974, 43-50.